Karol Wojtyla, pape Jean-Paul II | ||||||||||
Les racines de Karol Wojtyla : un pape marqué par les drames du 20e siècle Karol Wojtyla nait à Wadowice le 18 mai 1920, second fils dun père militaire et dune mère institutrice. Deux ans plus tôt, la Pologne recouvrait lindépendance politique perdue à la fin du 18e siècle. Karol Wojtyla a été marqué dans sa jeunesse par la disparition de tous ses proches. Il est âgé de 9 ans quand sa mère décède. Quelques années plus tard, son frère aîné meurt prématurément. Puis le père meurt en 1941. Ces épreuves familiales ont pris place dans un contexte historique difficile. Karol Wojtyla a partagé le sort dune Pologne particulièrement atteinte par les drames du 20e siècle. En 1939, la Pologne perd à nouveau son autonomie avec sa partition entre lAllemagne nazie et lURSS. Après la guerre, elle connaîtra le totalitarisme communiste jusquen 1989. Le pape Jean-Paul II visitera la Pologne communiste dès le début de son pontificat en 1979, puis de nouveau en 1983 et en 1987. Les rassemblements populaires suscités par ses visites, son soutien explicite au syndicat Solidarnosc, auront joué un rôle décisif dans la chute du pouvoir communiste en Pologne (1989), premier acte de la débâcle du bloc de lest. Laction polonaise de Jean-Paul II aura été une des illustrations dun pontificat marqué par les droits de lhomme et la propagation des conflits armés. En 1979, dès sa première encyclique, Jean-Paul II déclarait : « La paix se réduit au respect des droits inviolables de lhomme [...], tandis que la guerre naît de la violation de ces droits et entraîne encore de plus graves violations de ceux-ci ». Lun des derniers combats de Jean-Paul II aura été son opposition au déclenchement de la guerre en Irak par les États-Unis. Le 13 janvier 2003, devant le corps diplomatique accrédité auprès du Saint-Siège, il déclarait : « Non à la guerre ! Elle n'est jamais une fatalité. Elle est toujours une défaite de l'humanité ». Lexpérience ouvrière dans la Pologne occupée : la préoccupation sociale du pontificat Avant dentrer au séminaire, Karol Wojtyla a suivi des études de lettres, à luniversité Jagellon de Cracovie. Le travail obligatoire imposé par loccupant nazi interrompra ses études. A partir de la rentrée de 1940 et pendant presque 4 ans, Karol Wojtyla travaillera comme ouvrier dans une carrière de pierre dabord, puis dans une usine chimique. Jean-Paul II gardera de cette expérience une grande préoccupation pour les problèmes sociaux. En 1979, lors de son voyage au Mexique, il déclarait aux ouvriers de Monterrey : « Je noublie pas les années difficiles de la guerre mondiale où jai moi-même fait directement lexpérience dun travail physique comme le vôtre [...]. Je sais parfaitement combien il est nécessaire que le travail ne soit pas source daliénation et de frustration, mais quil corresponde à la dignité supérieure de lhomme ». Dans lencyclique Centisimus annus (1991) Jean-Paul II met également en garde contre une forme radicale de capitalisme : « La solution marxiste a échoué, mais des phénomènes de marginalisation et dexploitation demeurent dans le monde, spécialement dans le Tiers-monde, de même que des phénomènes daliénation humaine, spécialement dans les pays les plus avancés [...]. Il y a même un risque de voir se répandre une idéologie radicale de type capitaliste qui refuse jusquà leur prise en considération, admettant a priori que toute tentative dy faire face directement est vouée à linsuccès, et qui, par principe, en attend la solution du libre développement des forces du marché. » De la résistance par la culture au Conseil pontifical pour la culture Le jeune ouvrier na pas renoncé aux activités culturelles. Il intègre une troupe théâtrale davant-garde qui déploiera ses activités dans la clandestinité. Karol Wojtyla écrira plusieurs compositions poétiques et théâtrales dont certaines, comme la pièce La boutique de lorfèvre, ont eu par la suite un écho en dehors des frontières polonaises. La création littéraire naura pas été délaissée par Jean-Paul II : il sera le premier pape à publier un recueil de poésies (Triptyque romain, en 2003). | ||||||||||
Loccupant nazi - comme plus tard le pouvoir communiste - cherchera à briser les racines culturelles de lidentité polonaise. Les activités estudiantines et théâtrales de Karol Wojtyla constitueront une forme de résistance à loppression idéologique et politique. Devenu le pape Jean-Paul II, il déclarera le 2 juin 1980, à lUNESCO à Paris : « Je suis fils dune Nation qui a vécu les plus grandes expériences de lhistoire, que ses voisins ont condamnée à mort à plusieurs reprises, mais qui a survécu et qui est restée elle-même. Elle a conservé son identité, [...] non en sappuyant sur les ressources de la force physique, mais uniquement en sappuyant sur sa culture. » Cette histoire personnelle rencontrait la conviction du concile Vatican II. Celui-ci faisait de la culture lenjeu essentiel dune rencontre entre lÉglise et les hommes. Jean-Paul II aura donc fait de la culture un axe majeur de son pontificat. En 1982, il crée le Conseil pontifical pour la culture, et en 1993, il lui intègre le Conseil pontifical pour le dialogue avec les non-croyants (créé par Paul VI en 1965). La création de ce nouveau dicastère, présidé depuis le début par le cardinal français Paul Poupard, recevait la mission de promouvoir la rencontre entre les cultures et lÉvangile. Là encore, aux yeux du Pape, un caractère de résistance était attaché à cette mission. En décembre 2000, Jean-Paul II déclarait : « Une culture qui refuse de se référer à Dieu perd son âme en même temps que son orientation, devenant une culture de mort. » (Message pour la 34e Journée mondiale de la Paix). Sacerdoce et vie intellectuelle : un pontificat face aux défis de la foi Karol Wojtyla entre en 1942 au séminaire de Cracovie. Du fait de loccupation nazie le séminaire était réduit à la clandestinité. Karol Wojtyla a donc conservé son emploi douvrier pendant les deux premières années de séminaire. Le 1er novembre 1946, larchevêque de Cracovie, Mgr Sapieha (que Pie XII venait tout juste de créer cardinal) ordonne prêtre Karol Wojtyla, et lenvoie poursuivre ses études à Rome, à luniversité pontificale de lAngelicum. À Rome, le père Wojtyla sera hébergé au séminaire belge, ce qui lui vaudra de conserver une grande aisance en français. Après avoir soutenu sa thèse en juin 1948 sur le mystique espagnol saint Jean de la Croix, il sera rappelé à Cracovie début 49, pour y exercer une activité pastorale. En 1953, il soutiendra une thèse sur le philosophe allemand Max Scheler, à luniversité polonaise Jagellon, fermée lannée suivante par le pouvoir communiste. Professeur vacataire à luniversité de Lublin en 1954, il devient titulaire de la chaire déthique en 1957. Le pape Jean-Paul II écrira une encyclique sur les fondements de la théologie morale (Veritatis splendor, en 1993), et une autre sur les rapports entre foi et raison (Fides et ratio, en 1998). Les occupations intellectuelles du père Wojtyla ne lont pas empêché de développer une activité pastorale. Celle-ci sest orientée en direction des jeunes. Jean-Paul II aura conservé, sa vie durant, une réelle proximité avec les jeunes qui sexprimera de façon particulièrement forte à travers les Journées Mondiales de la Jeunesse ou « JMJ » (dont Paris en 1997, Rome en 2000 et Toronto en 2002). Ce contact privilégié avec la jeunesse aura comporté une double note de confiance et dexigence. Aux participants des « JMJ » de Rome, Jean-Paul II déclarait : « Il ne vous sera peut-être pas demandé de verser votre sang, mais de garder la fidélité au Christ, oui certainement ! [...] En l'an 2000, est-il difficile de croire ? Oui, c'est difficile ! On ne peut pas le nier. C'est difficile, mais avec l'aide de la grâce c'est possible. » Évêque au moment du concile : un pontificat marqué par Vatican II Le père Wojtyla est ordonné évêque auxiliaire de Cracovie le 28 septembre 1958. Comme tout évêque catholique, il est convoqué au concile Vatican II, ouvert par le pape Jean XXIII le 11 octobre 1962, et clôturé par le pape Paul VI le 7 décembre 1965. Mgr Wojtyla sera invité à apporter sa contribution personnelle au Concile, en étant impliqué dans le travail de rédaction de la constitution pastorale Gaudium et spes. Cest pendant le Concile, le 13 janvier 1964, que Paul VI nomme Mgr Wojtyla archevêque de Cracovie. Le nouvel archevêque prendra ses fonctions le 8 mars 1964. Cest encore de Paul VI que Mgr Wojtyla recevra le cardinalat, le 28 juin 1967. Du 7 au 13 mars 1976, Paul VI invitera le cardinal Wojtyla à prêcher les exercices de carême de la Curie romaine. Paul VI meurt le 6 août 1978. Mgr Wojtyla est cardinal électeur et prend part au conclave : Jean-Paul Ier est élu le 26 août 1978 et meurt un mois plus tard, le 28 septembre 1978. | ||||||||||
Le cardinal Karol Wojtyla est élu pape le 16 octobre 1978. Le pape Jean-Paul II se fixera comme objectif la mise en uvre du concile Vatican II. Le lendemain de son élection, il déclarait : « Nous voulons tout dabord souligner limportance permanente du IIe Concile cuménique du Vatican, et ceci signifie pour nous lengagement formel de lappliquer soigneusement.» Cest dans cette perspective que Jean-Paul II réformera le droit de lÉglise catholique par la promulgation du nouveau Code de droit canonique, en 1983. Il aura encore voulu offrir un exposé des fondamentaux de la foi catholique, par la publication du Catéchisme de lÉglise catholique en 1992. Cest encore lhéritage du concile qui explique lattachement de Jean-Paul II à leffort cuménique. Lencyclique Ut unum sint de 1995, ouvrant aux communautés chrétiennes non catholiques la discussion sur les modalités dexercice du ministère pontifical, en sera lun des signes marquants. Les efforts de rapprochement avec le judaïsme et le dialogue interreligieux seront aussi des aspects du pontificat à situer dans la perspective du Concile. À légard du judaïsme, Jean-Paul II posera des gestes hautement symboliques, dont lobjectif sera de favoriser le rapprochement avec lÉglise catholique1. À cette fin, Jean-Paul II a conduit un « examen de conscience » au sujet des fautes commises à lencontre des juifs au cours de lhistoire de lÉglise2. En outre, Jean-Paul II aura donné une visibilité au dialogue interreligieux par exemple à travers sa rencontre avec des jeunes musulmans au grand stade de Casablanca, en 1985, sa visite à la mosquée des Omeyyades à Damas, le 6 mai 2001, et encore les deux rencontres de prière interreligieuse à Assise, en 1986 et en 2002. Tous ces actes procédaient de la conviction du pape Jean-Paul II que le déploiement de lhéritage conciliaire était la manière adéquate de faire entrer lÉglise catholique dans le 3e millénaire. | ||||||||||
source : Conférence des Evêques de France
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